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LES DÉCORS DE LA FAÏENCERIE DE GIEN : QUAND LA MATIÈRE DEVIENT PALETTE

Depuis 1821, au bord de la Loire, la Faïencerie de Gien fait dialoguer tradition et création. Fondée par l’Anglais Thomas Hall dans l’ancien couvent des Minimes, la manufacture a bâti sa réputation sur une faïence fine façonnée, décorée et cuite à Gien même — un ancrage territorial qui nourrit encore aujourd’hui son identité chromatique et décorative.


Chaque pièce Gien naît et s’achève dans la manufacture : préparation des terres, moulage, séchage, émaillage, décor, cuisson. Cette maîtrise intégrale du cycle de fabrication garantit l’homogénéité des blancs, la profondeur des émaux et la netteté des décors, mais surtout un contrôle rare des couleurs. Reconnue "Entreprise du Patrimoine Vivant" et membre du "Comité Colbert", la maison revendique un savoir-faire d’excellence au service de l’art de vivre à la française.


Le « geste couleur » : pigments maison et main sûre

Chez Gien, les pigments sont élaborés en interne, puis posés par des artisans décorateurs formés plusieurs années. Pour les pièces de prestige, une technique héritée du XVIIIᵉ siècle est toujours utilisée : le contour du décor est imprimé à la main à partir de plaques de cuivre gravées, avant d’être peint à main levée. Exactitude du trait, dosage des oxydes, superpositions fines… autant d’étapes qui composent la signature chromatique Gien.



Des décors emblématiques

Au fil du temps, Gien a développé un répertoire de motifs qui incarnent autant de « familles » colorées – du bleu patrimonial aux palettes naturalistes en passant par les floraisons multicolores.


Oiseaux de Paradis : tiré des archives, ce décor intemporel associe la grâce de silhouettes ailées à une bordure godronnée soulignée d’un fin filet bleu. Une pièce manifeste où le bleu, couleur historique de la faïence, sculpte les contours et guide le regard.



Les Filets (Filet Bleu, Cobalt, Rouge, Pivoine, Citron, Vert, etc.) : une leçon d’épure où la couleur, réduite à un trait, devient architecture. Peints à la main, ces filets déclinent une large palette – du bleu outremer à des tons corail, pivoine ou citron – et dialoguent aisément avec d’autres décors. L’écru chaud du fond met en valeur la vibration manuelle du pinceau.



Sologne : réalisé avec l’artiste Estelle Rebottaro, ce décor naturaliste convoque brun, vert et sépia pour célébrer forêts, étangs et faune du Centre de la France. L’ensemble compose une galerie presque « natural history » sur fond crème, où chaque nuance semble sortie d’une boîte d’aquarelle.



Jardin du Palais : cette collection joue avec les effets de contraste : fonds clairs côtoient fonds sombres, évoquant des ambiances diurnes et nocturnes. Ce jeu visuel renforce l’impact du décor, captivant le regard et invitant à une lecture différente selon la pièce ou la lumière.



Savoir-faire et collaborations : une palette qui se réinvente

La vitalité des couleurs Gien tient autant aux archives qu’aux rencontres. Le studio de création orchestre les recherches chromatiques et formelles, tout en invitant régulièrement des artistes et des marques à enrichir le vocabulaire décoratif de la manufacture. Cette dynamique permet d’alterner rééditions patrimoniales, lignes épurées et collaborations contemporaines — toujours avec la même exigence de teintes stables et lumineuses après cuisson.



Pourquoi les couleurs Gien nous touchent ?

Trois raisons expliquent l’émotion particulière de ces décors :

  1. La main visible : une irrégularité infime d’un filet, une transparence d’aquarelle… ces "micro-accidents" sont la preuve de la présence de l’artisan.

  2. La mémoire des motifs : des oiseaux hérités des archives aux scènes de Sologne, le décor raconte un territoire, un patrimoine visuel, et donne aux couleurs un supplément d’âme.

  3. L’accord matière-couleur : l’écru lumineux de la faïence Gien n’est pas un simple fond ; il "chauffe" les pigments et offre une profondeur singulière aux bleus, rouges ou verts.



La force des décors et des couleurs Gien ne tient pas seulement à une esthétique reconnaissable : elle vient d’une culture d’atelier où l’on conçoit les pigments, maîtrise les gestes, et pense la couleur comme une matière vivante. Entre héritage bicentenaire, innovation discrète et collaborations choisies, Gien continue de peindre une idée du beau français - élégante, sensible, durable. Et à chaque nouvelle collection, c’est toute la Loire qui semble, une fois encore, se refléter dans l’émail.

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